Je hais New York. De tous les endroits dans lesquelles j'aurais pu mes réfugier il avait fallu que je me retrouve dans cette ville pleine à craquer de gens qui se ressemblent tous et qui sont tellement nombreux que s'en ai déroutant. Mais je suppose que quand on est coursé par la police il vaut mieux se trouver dans un endroit où on peut facilement les semer et se mêler à la foule. Tout est grand ici, les gratte-ciels, le métro et même les écrans. On dirait que les New-yorkais essayent de prouver au monde qu'ils sont supérieurs, j'ai toujours su que les américains avaient un complexe d'infériorité. Et dire que Londres me manque... Moi qui pensais que je ne voudrais plus jamais y retourner après tous les événements qui s'y sont produits. Je tourne la sucrette de mon café en laissant échapper un petit soupir mélancolique qui me vaut le regard intrigué d'une vieille dame à la table en face de la mienne. Stupides américains qui se mêlent de ce qui ne les regardent pas. C'est pas comme si elle pouvait me comprendre la vieille, elle doit sûrement penser que je viens de casser avec mon copain ou un truc stupide comme ça. Les problèmes normaux d'une personne normale. Ça fait maintenant quatre mois que je suis en cavale pour le meurtre de Trisha et les choses n'arrêtent pas de se compliquer. Mon employeur commence à se poser des questions sur moi, c'est vrai qu'avec une employée qui ne veut recevoir son salaire qu'en liquide y a de quoi s'en poser. Je lui ai donné un faux nom, comme ça s'il essaye d'en savoir plus sur mon passé il ne trouvera rien qui puisse le troubler. J'espère juste qu'il ne va pas prévenir la police. J'ai bien fait de choisir ce café, son emplacement me donne une belle vue sur la façade ouest de la cathédrale de St John the Divine. J'ai toujours été fascinée par les monuments anciens, leur histoires et les souvenirs qui les habitent m'impressionnent. Ce sont les restes du passé et il faut les préserver. C'est triste quand on y pense, les hommes meurent et les seules choses qui laissent derrière eux sont des bâtiments. Je fais un signe impatient de la main au serveur pour qu'il m'apporte l'addition, mais il ne tient pas compte de mon empressement et vient vers moi en prenant son temps. Des traces de sueur tachent sa chemise blanche, c'est vrai qu'il faut particulièrement chaud aujourd'hui je suis bien contente de ne pas travailler. Je le paye sans laisser de pourboire, comme toujours. Pour la petite anecdote, je me venge de toutes les fois où on ne m'en a pas laissés.

Je traverse la rue jusqu'au Morningside Park, le regard alerte pour ne pas me retrouver trop près des hommes de loi. Ce parc est devenu mon préféré de New York, les arbres y sont toujours verts et il y règne une sensation de calme et de quiétude. Il me rappelle celui qui se trouvait à deux pas de chez moi à Londres, même si je n'avais pas tous ces grands buildings aux alentours comme ici. Mon subconscient me joue des tours, il m'amène à des endroits qui ressemblent aux lieux de prédilection de mon enfance. Au final le passé refait toujours surface que l'on le veuille ou non. Je m'assoie sur un banc qui surplombe le magnifique lac bleu azur de Morningside et fouille dans mon sac pour en sortir ma lecture de la journée « Pet Semetry » de Stephen King mon auteur favori. Plongée dans ma lecture, je me laisse tellement submergée par le livre que la surprise me prend lorsque je regarde ma montre. Cela fait bien trois heures que je bouquine, je savais que j'avais tendance à dévorer un livre mais là... Je me lève doucement du banc pour ne pas brusquer les muscles de mes jambes engourdis par mon immobilité. Je lance un dernier regard vers le lac, quand un visage familier entre dans mon champ de vision. La brune aux yeux bleus de la boutique ! Ah, je me souviendrais toujours de son comportement bizarre. Cette fille avait eu peur de moi, alors que je ne lui avais rien fait. Et bien sûr, lorsque je m'apprêtais à lui demander des explications elle est parti en courant pour éviter l'altercation. Lâche.